Le Pont du Batelier

          En 1869, alors qu'aucun ouvrage ne reliait Piégros à Blacons, l'idée d'installer un bac à câble fut évoquée. C'est ainsi que le 21 mars de cette année là, le Conseil Municipal de Piégros (qui ne prendra le nom de Piégros-La Clastre qu'en 1872), délibérera sur ce sujet : " Considérant que ce projet est opportun et avantageux ; attendu que les deux communes se trouvent à très petite distance et qu'en conséquence elles ont de fréquents rapports ; le Conseil Municipal est d'avis que l'autorisation d'établir un bac à piétons sur la drôme, soit accordée par l'administration supérieure ". Le bac fut donc autorisé à s'installer à environ 700 mètres en amont du l'actuel pont. Le batelier tiendra son rôle de " passeur " jusqu'en août 1890.


          En 1881, la commune de Piégros-La Clastre n'avait comme voie de communication carrossable vers l'extérieur, que celle reliant Crest à Saillans. Les 882 habitants de cette commune avaient pourtant un réel besoin, sinon un désir, d'échanges et de communications vers le nord ; notamment avec la vallée de la Gervanne qui comptait alors 3600 âmes et 14 usines. C'est cette année là que débutèrent les études préliminaires à la construction d'un pont sur la rivière Drôme. Mais c'est seulement en 1883 que le projet prendra forme. La commune de Piégros-La Clastre se rendra propriétaire, pour un millier de Frans, des terrains nécessaires à la voie d'accès du futur ouvrage. Mirabel et Blacons en fera de même, rive droite.


          La même année, un plan de financement pour une dépense prévisible de 72000 francs (de l'époque) est envisagé : 45.50 % pour l'État, 24.50 % pour le Département de la Drôme et les 30 % restant, soit 21600 francs, seront payés par les communes et particuliers intéressés... Des négociations qui se poursuivront jusqu'en 1885, il ressortira que certaines communes et industriels renonceront à participer ou offriront moins que demandé. Trois communes (Blacons - Montclar et Beaufort) ayant voté ensemble 2000 francs, il restait à trouver les 19600 francs manquants. "Considérant l'importance capitale de ce débouché vers le nord et l'urgence d'établir un pont entre Piégros-La Clastre et Mirabel et Blacons ; considérant que cette construction devrait avoir pour conséquence la création d'une gare sur le chemin de fer, ce qui est dans l'intérêt de toutes les localités environnantes ". Le Conseil Municipal de Piégros-La Clastre, le 15 février 1885, portera sa participation de 10000 à 19600 francs.


          Mais c'est seulement le 15 juillet 1888, que cette même assemblée approuvera le projet de construction du pont constitué de 4 arches de 15 mètres d'ouverture chacune. Cette approbation ne lui empêche pas de regretter que les exigences budgétaires n'aient pas permis la création d'un ouvrage à 2 voies. Il regrettera également l'inesthétique du parapet.


          Les travaux débuteront en octobre de la même année et l'on note, sur un compte rendu de chantier, " que déjà, les abords se couvrent d'approvisionnement et qu'une pompe à vapeur et 30 ouvriers sont installés sur le chantier ". Tout fait alors penser que l'ouvrage pourra être livré à la circulation vers la fin de l'année suivante. C'était compter sans les imprévus. Les moyens de l'époque n'ayant pas permis de fonder les piles sur le rocher plus profond qu'envisagé, la mise zn place de pieux en bois était devenue nécessaire. Cela entraînera du retard et un surcoût de 15000 francs ! Les travaux se poursuivront ensuite sans trop d'accroc jusqu'en 1890 et le pont sera inauguré le 27 septembre 1891. Il aura toutefois coûté plus de 23000 francs à la commune de Piégros-La Clastre ; une somme bien supérieure à son budget annuel.


          Un demi siècle plus tard, en 1941, ce pont sera dynamité par l'armée française  afin de stopper l'avancée Allemande puis reconstuit l'année suivante. Mais là ne s'arrête pas son histoire : la crue du 7 janvier 1994 aura raison des fondations d'une de ses piles entraînant la destruction du tablier à 08h10 soit 30 minutes après le passage du car scolaire. Mais les hommes sont tenaces et l'ouvrage (élargi à 2 voies) sera reconstruit et l'inauguré un an après, jour pour jour.


          Il portera désormais le nom du "Pont du Batelier"

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